Nous sommes généalogistes successoraux. Nous recherchons des héritiers inconnus pour leur transmettre souvent bien plus qu’un héritage : une partie de leur histoire ! « Histoires en héritage », vous invite à découvrir les destins hors du commun de ces hommes et de ces femmes dont la vie a été partiellement révélée après leur mort.
Dans « En quête du père », François STALIN vice directeur des recherches de notre bureau de Paris, nous plonge dans une quête de vérité émouvante, qui permet à Carole, une jeune femme à la recherche de son père, de renouer avec son histoire familiale. Un récit qui révèle la sensibilité humaine au cœur des enquêtes successorales.
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Il s’agit de la succession de Madeleine. Madeleine est décédée à l’âge de 90ans environ, elle était veuve et le notaire avait été contacté par sa fille.
La fille avait expliqué au notaire que sa mère avait un fils dont elle avait perdu la trace depuis de nombreuses années, qui s’appelait Philippe, que Philippe était marié ou avait été marié et qu’il avait une petite fille.
Dans un premier temps nous cherchons Philippe. Au fur à mesure des enquêtes, on s’aperçoit qu’il y avait une mention de décès. Cet acte de décès indiquait que Philippe était décédé sur le quai d’une station de métro. Soit Philippe s’est suicidé, soit il était SDF. Nous nous mettons à la recherche de la fille de Philippe qui selon sa tante est prénommée Carole.
Nous recherchons dans l’état civil, nous constatons effectivement que Carole s’est mariée et qu’elle a divorcé. Nous parvenons dans un premier temps à localiser son ex-mari. Je prends contact avec lui et je lui dis que je cherche à joindre Carole pour une histoire de succession. Il me dit « Bon effectivement c’est mon ex-épouse, je vais la prévenir de votre démarche mais je tiens à vous dire une chose, vous allez toucher là un point sensible. Depuis de nombreuses années elle est à la recherche de son père dont elle n’a plus de nouvelles depuis qu’elle a 10 ans, depuis la date de la séparation avec sa mère et donc il va falloir être très prudent. ». Cet entretien téléphonique était en fin de matinée, je rentre de déjeuner à 13h45, et dans le hall attendait une dame et c’était Carole.
Je commence à lui expliquer l’objet de mon intervention, elle me coupe et elle me dit « Écoutez Monsieur, avant toute chose, mon père, est-ce que vous avez retrouvé mon père ? ». Vous savez, ça va très vite à ce moment-là, et puis le contexte, il faut que je lui dise, je ne peux pas jouer le mystère autour de ça. Je lui dis « Oui Madame, votre père est décédé », et puis elle s’effondre, des gros sanglots.
Vous savez, c’est difficile quelqu’un qui pleure devant vous sans rien dire. Donc je finis lui prendre la main. Elle commence à parler du manque qu’elle a eu, des recherches qu’elle a faites, à raconter ses souvenirs de ce père fantasque, incapable de mener une vie familiale, une vie sociale, une vie professionnelle.
Elle le voyait disparaître, puis réapparaître, et pour elle ces réapparitions étaient quelque chose de fantastique parce qu’il était excessif dans tous les sens. C’est-à-dire que quand il la retrouvait c’était des cadeaux, des moments privilégiés et puis au bout d’un certain nombre d’années la maman, donc l’épouse, n’a plus supporté. Elle l’a foutu à la porte et puis plus rien. Sa mère a coupé tous les ponts avec la famille de son ex-mari, donc avec Madeleine et sa tante.
J’ai fini par lui dire « Écoutez, je sais que c’est dur pour vous d’apprendre cette chose-là, mais dites-vous bien une chose, c’est que maintenant vous savez, vous n’êtes plus dans la recherche, et vous allez pouvoir vous reconstruire avec ça. ».
Elle m’a repris la main, elle m’a remercié et elle m’a dit « Écoutez, j’ai eu la chance de tomber sur quelqu’un qui a su me parler, et qui a su m’écouter ».
Elle m’a envoyé une lettre m’apprenant qu’elle avait repris contact avec sa tante. Elle avait reconstitué on dirait, ce pan d’histoire familiale qu’elle avait perdu, et que sa tante avait pu lui parler de son père lorsqu’il était enfant, lui raconter les anecdotes, et puis lui parler aussi de sa grand-mère.
Ça m’a touché parce que mes recherches me faisaient toucher plus à la sensibilité humaine, qu’à l’aspect patrimonial des choses, et de réparer quelqu’un de vivant.