Nous sommes généalogistes successoraux. Nous recherchons des héritiers inconnus pour leur transmettre souvent bien plus qu’un héritage : une partie de leur histoire ! « Histoires en héritage », vous invite à découvrir les destins hors du commun de ces hommes et de ces femmes dont la vie a été partiellement révélée après leur mort.


Dans « La résurrection », Maximilien LANDIER, généalogiste chez Coutot-Roehrig à Marseille, nous montre comment la vérité peut se cacher derrière des apparences trompeuses et révèle la profondeur des liens familiaux perdus et retrouvés.

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Un notaire marseillais nous confie un nouveau dossier concernant Georges, un anglais retraité qui a quitté l’Angleterre pour s’installer en Provence.

Georges est veuf, il avait un fils qui est décédé et lui-même vivait en concubinage avec une française, Mireille, à LOURMARIN un petit village de Provence.

Mireille n’a malheureusement quasiment pas d’information concernant la famille de Georges. À priori il était fils unique, et il avait des cousins éloignés qu’elle ne connaît pas.

Très rapidement elle m’explique un petit peu le parcours de vie de Georges, qui a fait une carrière dans l’administration britannique, et qui suite au décès de son fils et de sa femme, est venu s’installer en Provence où ils se sont rencontrés.

La conversation s’installe au sujet de son fils Andrew qui a eu un destin tragique. Elle me raconte qu’Andrew c’est un garçon brillant, qui a fait des études à Oxford, qui est diplômé en économie et qui d’ailleurs a écrit de nombreux livres, des livres assez pointus en économie sous un pseudonyme, celui de Andy CROLEY. Par ailleurs, Andrew était un garçon philanthrope qui était bénévole pour une association. Il parcourait les écoles primaires pour sensibiliser les enfants à la sécurité routière.

Malheureusement en 2003, la femme de Georges, la mère d’Andrew, meurt d’un cancer fulgurant et c’est une très grande douleur pour le défunt et pour son fils également. À ce moment-là Andrew bascule complètement, et il perd pied. Il tombe dans l’alcool, la drogue il rentre dans une secte hippie et progressivement il se il se marginalise. Il vend sa maison aux enchères il finit dans une très grande précarité et il tente de se suicider, tentative qui ne va pas aboutir.

En revanche il va être hospitalisé dans un institut psychiatrique où il va rester interné plusieurs mois. C’est la descente aux enfers. Andrew va tout de même échapper à la surveillance des médecins et il va s’enfuir de cet hôpital, et la police va se mettre à sa recherche.

3 jours plus tard, elle va découvrir en haut une falaise des vêtements appartenant à Andrew, ainsi que des papiers. La police va faire une enquête, le corps d’Andrew n’a jamais été retrouvé et finalement elle conclura à la thèse d’un suicide. Le juge a fini par déclarer qu’il était mort, donc aux yeux de la loi, Andrew est définitivement mort.

Pour Georges c’est vraiment l’épreuve de trop. Il décide de changer de vie, et il quitte tout pour s’installer en Provence, et là il va rencontrer Mireille qui va le consoler de tous ses malheurs.

Je quitte donc Mireille et je lance les recherches au Royaume-Uni, m’attendant à trouver des cousins éloignés dont elle m’a parlé. Mais en même temps, pour une raison que j’ignore, l’histoire d’Andrew me reste dans l’esprit, et je me décide à faire des recherches sur internet.

Je commence par taper le nom et le prénom d’Andrew, je ne trouve rien de particulier. Ensuite je vais faire la recherche à son nom d’auteur, Andy CROLEY, et là je vais découvrir qu’il existe sur les réseaux sociaux des profils d’Andy CROLEY.

L’un de ces profils a une image qui attire tout de suite mon regard. C’est un lapin en peluche qui traverse un passage protégé. Tout de suite j’ai l’histoire que Mireille m’a raconté qui me revient, de ce bénévolat qu’il faisait dans les écoles pour sensibiliser à la prévention routière.

Là en creusant un peu sur le profil, je m’aperçois qu’il est toujours actif et qu’à priori il habiterait en France et même en Provence. Je me décide à lui envoyer un courrier.

Les semaines passent, et un jour je reçois un appel téléphonique d’une femme. Cette femme me dit qu’elle a des informations concernant Andy CROLEY et qu’elle aimerait me rencontrer à son domicile. Je me rends devant cette petite maison, je sonne un peu le cœur battant et je vois une petite femme qui m’invite à rentrer à l’intérieur en me disant que quelqu’un m’attend.

Elle me fait rentrer dans une petite pièce où un homme est assis devant une table avec des papiers étalés devant lui. Là il me dit avec un accent anglais « Vous recherchez Andy CROLEY ? », « Oui, je recherche Andy CROLEY, mais surtout un certain Andrew. », et là il me dit « Je m’appelle Andrew, c’est un pseudonyme et je vis incognito en France. »

Je suis complètement chamboulé par ce que je découvre. Il m’a tendu les papiers qui étaient sur la table, un vieux passeport et un acte de naissance, et là il me dit « Je suis le fils de Georges. »

Il commence à me raconter son histoire, sa descente aux enfers, son internement en asile psychiatrique, son envie de refaire sa vie, et en fait il me raconte qu’il a organisé sa disparition.

Andrew a vécu 20ans dans l’anonymat en France avant qu’on ne le retrouve, et la lettre a été pour lui un élément déclencheur. Il s’est demandé justement si ce n’était pas son père qui le recherchait, et donc il a bien fallu le détromper en lui expliquant que non, ce n’était pas son père qui le recherchait, mais c’était suite au décès de son père que nous le recherchions. Andrew est complètement bouleversé d’apprendre que son père est en fait mort, et qu’il ne le savait pas, et surtout qu’en réalité ils habitaient à quelques kilomètres l’un de l’autre sans le savoir.

Très rapidement, j’explique à Andrew que juridiquement sa situation est compliquée parce que quand on est mort on n’hérite pas d’un mort. Il va falloir faire de longues démarches auprès de l’administration anglaise pour le ramener à la vie aux yeux de la loi. On pourra à ce moment-là, permettre à Andrew d’hériter de son père.

Cette histoire montre bien que très souvent dans notre métier la vérité n’est pas toujours là où on pense qu’elle doit être.

On a quelqu’un qui était mort, qui finalement ne l’était pas malgré toutes les apparences, et ça montre aussi qu’un généalogiste doit être quelqu’un qui justement a des antennes, et qui, quand il sent quelque chose, doit suivre un peu son instinct.